Mosaïques Archéologie au coeur de la recherche scientifique
Les responsables d’opération et les spécialistes mobilisés sont autant de chercheurs qui contribuent activement à cette discipline scientifique, à travers la participation à des colloques et la réalisation de publications, à portée locale, nationale ou internationale. Cette démarche a pour objectif d’assurer la diffusion des résultats des fouilles réalisées auprès de la communauté scientifique.
Quelques fouilles emblématiques
Depuis le début de son activité en juillet 2009, Mosaïques Archéologie a réalisé plus de 140 opérations d'archéologie préventive. Découvrez ci-dessous certaines recherches que nous avons réalisées.
Les comptes-rendus d'opérations
LE ROY (L.), AYASSE (A.), DURAND (B.), DUNY (A.), COMPAN (E.), FERDINAND (L.), FEUGERE (M.), MALIGNAS (A.), SAVE (S.) – Mise en valeur des terroirs autour de l’établissement de La Rouge du second Âge du Fer au Haut Empire, Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Loupian, aout 2012, 280 p.
LE ROY (L.), AYASSE (A.), DUNY (A.) (coll.), DURAND (B.) (coll.) – Deux ouvrages hydrauliques en marge de l’établissement antique de La Rouge (Brignoles, Var), in ARNAUD(C.) dir. : Histoire d’eau en Provence Verte, Cahiers de l’Association d’Histoire Populaire de Tourvaine, 2012. p. 368 – 372.
Responsable d’opération : L. Leroy
La fouille de l’établissement de « La rouge » s’intègre dans une fourchette chronologique comprise entre le second Âge du Fer et le Haut Empire. Elle apporte une contribution à la documentation déjà acquise lors des prospections et diagnostic menés au préalable. Les vestiges du second Âge du Fer occupent la partie orientale de la fenêtre de fouille. Un niveau de paléosol et un puissant mur ont été dégagés sur une centaine de mètres carrés. Le mobilier correspond très majoritairement à des céramiques qui orientent la chronologie vers le second Âge du Fer. La fonction de cet espace pourrait être liée, par comparaisons avec les habitats et enclos protohistoriques du Centre-Var. En rive droite du ruisseau de La Rouge, un aqueduc suivi sur environ 45 m de long a été mis au jour. Dans son quart sud-est, il est pourvu d’un petit bassin destiné à l’entretien de l’aqueduc. Au sud du ruisseau canalisé, la fouille a permis de mettre en évidence un mur contre lequel vient s’appuyer un radier de blocs en hérisson. Cet ensemble évoque un mur de terrasse, mais la présence d’un niveau de sol jouxtant le mur à l’est, suggère également de formuler l’hypothèse d’une rampe destinée à l’accès aux parcelles méridionales plus élevée. En rive ouest du ruisseau, la densité des vestiges a permis de distinguer trois phases d’aménagement : la première (fin du Ier s. av. J.-C.) correspond à un calibrage des berges du ruisseau, une seconde phase d’aménagement associée à un rehaussement local du niveau de sol qui est suivie par l’installation d’une série de tranchées datée du Ier s. ap. J.-C. Celles-ci pourraient indiquer une mise en culture de l’espace en rive occidentale du ruisseau. La dernière phase d’aménagement de cette zone voit la mise en place d’une batterie de quatre bassins de décantation d’argile en rive occidentale du ruisseau. Elle est à mettre en relation avec le four de potier identifié à quelques dizaines de mètres plus au sud. La datation de ces vestiges est basée sur une étude métrologique des tuiles indiquant une construction échelonnée entre le IIe s. au début le IIIe s. ap. J.-C.
ZAARAOUI (Y.), LONGEPIERRE (S.), FERDINAND (L.), GARNOTEL (A.) – Un tronçon de la voie aurélienne (Chemin de la Seigneurie), Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Loupian, novembre 2011, 137 p.
ZAARAOUI (Y.) – Un tronçon de la voie aurélienne près de Cabasse (83) : Méthode de construction d’une voie antique en milieu humide et son franchissement d’un cours d’eau , in ARNAUD(C.) dir. : Histoire d’eau en Provence Verte, Cahiers de l’Association d’Histoire Populaire de Tourvaine, 2012, p. 373 à 374.
Responsable d’opération : Yahya Zaaraoui
La fouille réalisée à la jonction entre la commune de Cabasse et Flassans au lieu-dit du « Chemin de la Seigneurie » a permis de caractériser la structure interne d’un tronçon de la voie aurélienne sur une longueur de 110 m ainsi que ses structures attenantes : mur bordier et réseau fossoyé. A l’extrémité est du site où se situe un pont actuel permettant la traversée du cours d’eau du Roudaï, ont également été identifiés les vestiges d’une structure de franchissement ainsi qu’une structure de berge antique. La fouille et l’analyse du bâti ont permis de distinguer un rétrécissement en baïonnette du mur bordier de la voie à cet endroit. Ce qui permet d’envisager un franchissement de ce cours d’eau durant l’Antiquité par un pont maçonné ou mixte. Le départ du tablier n’a pas pu être observé puisque le pont moderne repose sur une partie des structures de franchissement antiques. Si les données architecturales concernant les modes de construction de la voie (statumen, rudus, niveau de circulation) sont nombreuses, les données chronologiques sont elles beaucoup plus lacunaires. La mise en place d’AMS et C14 sur les charbons prélevés dans des niveaux de comblement supérieur du fossé bordier ou dans les niveaux de construction de la voie ont permis d’obtenir une datation du début Vème siècle apr. J.-C. à la fin de la 1er moitié du VIème siècle apr. J.-C. pour la dernière période de fonctionnement de la voie. Cette opération a permis d’appréhender les méthodes de construction de voie romaine en milieu humide (utilisation de deux niveaux de radiers dans les fondations). Elle apporte également une documentation d’un grand intérêt concernant les moyens mis en œuvre pour la construction des ouvrages de franchissement sur les voies romaines ainsi que les techniques de stabilisation des berges. Entre autre, elle permet d’obtenir de précieuses informations sur le réseau viaire mis en place à proximité de la ville romaine de Matavo et sa pérénisation de l’Antiquité à nos jours.
DUNY (A.), BANER JEA (R.), BATCHELOR (C.), GRAY (L.), SAVE (S) – Une structure tumulaire du Bronze final en Haute-Auvergne : Le tertre n°6 du Lac Lant à Espalem. Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Cournonterral, mai 2013, 149 p.
Responsable d’opération : A.Duny
Les vestiges apparaissent relativement bien conservés et se répartissent en deux zones : l’une centrée sur le tumulus n°6 daté du milieu de l’Âge du Bronze et la seconde sur les pierriers n°4 et n°5 issus des travaux agricoles menés sur la planèze dont on observe encore l’activité sur les parcelles adjacentes.L’architecture du tumulus n°6 présente une mise en œuvre classique d’un tertre d’environ 11 m de diamètre, à trois couronnes. La troisième couronne, conservée sur huit assises sur un peu plus d’un quart du monument représente un exemple rare en Basse-Auvergne. La céramique mise au jour présente une homogénéité certaine qui corrobore la thèse d’une seule phase de construction déjà pressentie grâce à l’analyse architecturale. La découverte d’une préhension en bouton digité et de deux fragments de panse carénée, à arête vive ou méplat, oriente la datation entre le Bronze moyen et le Bronze final I. Des calibrations AMS ont été réalisées sur deux échantillons récoltés en partie centrale et en quart nord-est. Elles coïncident pleinement avec ce phasage. Dernier argument qui nous permet d’envisager une datation du milieu de l’âge du Bronze pour l’édification du tumulus n°6 : la présence d’une aire de combustion datée du Bronze moyen à une cinquantaine de mètres au sud-est du monument funéraire. L’étude pétroarchéologique des silex a permis de définir, outre les provenances, que les pièces recueillies renvoient à une origine plus ancienne que l’érection du tertre et traduisent de fait un ramassage et une réutilisation volontaire. Leur présence à la fois sous le tertre et au coeur de sa structure plaide en faveur d’une dépose de ces artefacts par les bâtisseurs. Le tumulus n°6 connaît des fréquentations et des interventions postérieures, probablement dès le HaC ou Ha D1-2. Elles s’illustrent par un fragment de vase de stockage à décor d’impression à l’estèque et une bûche brûlée sur place au contact extérieur de la première assise de la troisième couronne (2410 ± 35 BP). La fibule de la Tène B2 découverte lors du diagnostic indique quant à elle un passage sur la zone au second Âge du Fer. Enfin, la présence d’horizons charbonneux datés par calibrations AMS du Haut-Empire (1800 ± 30 BP et d’un bord de cruche en céramique grise non tournée démontre une fréquentation antique et médiévale.
DUNY (A.), AYASSE (A.), BANER JEA (R.), BATCHELOR (C.), GRAY (L.), SAVE (S.) – Une structure tumulaire du Bronze final en Haute-Auvergne : Le tertre n°1 du Lac Citrou à Espalem, Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Cournonterral mai 2013, 133 p.
Responsable d’opération : A.Duny
Une seconde opération en parallèle à celle du « Lac Lant » menée sur le tertre du « Lac Citrou , a également livré les restes d’une couronne périphérique, d’une partie de la chape et de la calotte tumulaire. Son diamètre restitué fait état d’une circonférence d’environ 11,30 m. Bien que l’état architectural des tertres soit remarquable, l’absence en leur sein de toutes traces de sépultures demeure problématique. Cette indigence laisse présager que le mode sépulcral choisi fût celui de l’inhumation. La nature du substrat associé à des variations de températures conséquentes ont pu engendrer une dégradation totale des restes osseux, y compris des dents. Les deux dépôts de tessons découverts sous l’emprise du tertre, en partie centrale et dans le quadrant sud-est, ont livré un matériel datant. De plus, l’identification et le recollage de plusieurs fragments de céramique appartenant à un même vase plaident en faveur d’un bris et d’une dépose intentionnels de ces artefacts sous le tumulus. Le mobilier issu de ces deux concentrations, ainsi que les fragments isolés, répandus au hasard sur le paléosol, présentent une homogénéité typo-chronologique. La série exhumée renvoie à des récipients à bord divergent et lèvre aplatie, horizontale ou biseautée, caractéristiques de la culture matérielle du Bronze final IIb/IIIa. Les bouleversements architecturaux et l’hétérogénéité du mobilier témoignent à eux seuls des interventions ultérieures sur le tertre. De ces fréquentations subsiste notamment une série conséquente de fragments en pâte calcaire sableuse, claire ou rosée, dont certains portent un décor incisé de chevrons. Ces éléments renvoient aux productions laténiennes régionales. Ils soulèvent la question d’un geste de dépôt intentionnel : culte aux ancêtres ? A une période plus récente, probablement contemporaine, correspond la construction d’un mur parcellaire et d’une cabane de pierres sèches qui, au-delà de s’appuyer contre le tumulus, en ont spolié de nombreux blocs. Le mobilier constitue ainsi, avec l’architecture, un témoin unique du geste funéraire. Bien que l’ensemble céramique des deux tertres soit peu important, il permet néanmoins de replacer les tumulii au sein d’une chronologie Bronze moyen ou Bronze final I pour le tertre du Lac Lant, Bronze final IIb-IIIa pour celui du Lac Citrou.
BUFFAT (L.), GALY (J.), BRUNET (V.), CADEILHAN-KEREBEL (J.), MASBERNAT-BUFFAT (A.), RIVALAN (A.), SEREE (F.) – La nécropole protohistorique du Causse (partie orientale). Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Loupian, janvier 2012, 2 volumes : 504 p. et 501 p.
Responsable d’opération : L.Buffat
Cette fouille a permis de dégager 360 dépôts s’intégrant au complexe funéraire protohistorique. Ces ensembles s’intègrent aux cinq phases reconnues lors de la publication de 2003 (Giraud et al. 2003). Dans une première phase, une quarantaine de tombes ont pu être attribuées au Bronze final IIIb. Les dépôts sont très simples, généralement composés d’un vase cinéraire et d’un ou deux vases d’accompagnement. La phase II marque un déplacement de l’ensemble funéraire vers l’est. Les dépôts présentent la caractéristique d’être fréquemment fragmentaires : sur les 20 ensembles clairement datables de cette période, cinq seulement sont des tombes avec vase cinéraire. Les séries céramiques de la phase II sont assez maigres et n’apportent pas véritablement d’informations nouvelles : le décor à la cordelette apparaît tandis que le répertoire enregistre une multiplication des formes ouvertes. Quant au mobilier métallique, il se compose d’éléments classiques, telles les épingles à tête annulaire. Les tombes de la phase III marquent des changements significatifs dans la forme et l’organisation des loculi. Les fosses sont désormais beaucoup plus grandes, leur disposition est plus clairement orthonormée, tandis que les entourages deviennent quadrangulaires. La forme des dépôts est très particulière, puisqu’aucune tombe n’a livré de vase cinéraire en place. Tous les ensembles attribués à cette phase (18 en tout) contiennent tantôt des vases d’accompagnement, tantôt des tessons, parfois les deux, mais jamais de vase ossuaire en place. Le mobilier est assez fragmenté et n’apporte pas d’éléments de connaissance substantiel, tant au niveau de la céramique que du métal. La phase IV est très peu documentée par la fouille de 2010. Les tombes de cette période ont été très majoritairement détruites, certainement par des travaux réalisés en 1930 (aérodrome). Il n’en subsiste que trois, dont les caractéristiques ne se démarquent pas de celles identifiées antérieurement : présence de vases en grande quantité, abondance des dépôts de faune. C’est pour la phase la plus récente de la nécropole (phase V) que les informations nouvelles sont les plus importantes. Une centaine de tombes se rattache à cette période. Cette période marque la réapparition des entourages circulaires. La présence de tombes à armes constitue une découverte à caractère spectaculaire. Pas moins de cinq tombes ont livré des épées complètes, alors que deux autres contenaient uniquement des éléments de fourreau (bouterolles). L’existence de deux tombes associées à des inhumations d’équidés est un autre élément exceptionnel. Ces animaux ont été inhumés avec les éléments de leur harnachement posés sur le côté. La phase V est très bien identifiée grâce à un mobilier métallique et céramique caractéristique. Parmi les céramiques, dominent les urnes à fond plat ou ombiliqué, ainsi que les bols et coupes à languette perforée. Le mobilier métallique se révèle abondant : agrafe de ceinture (à un ou trois crochets), fibule du type « Golfe du Lion », fibule arbalétiforme et fibule à arc coudé.
L’étude anthropologique montre un recrutement assez classique. Les quantités d’os brûlés déposées dans l’urne cinéraire sont globalement faibles. Les os témoignent en outre de températures souvent moins élevées qu’aux périodes plus anciennes.
De façon globale, la fouille réalisée en 2010 sur la nécropole du Causse aura donné une moisson inespérée de résultats. La présence de nombreuses tombes à armes, celle d’inhumations d’équidés et la diversité des types de dépôts présentent un intérêt majeur. Cette nouvelle fouille ne permet pas d’affirmer que toutes les limites de la nécropole sont connues. Si les limites occidentale et méridionale sont fermement établies, les limites septentrionale et orientale ne sont pas clairement identifiées. Avec une longueur minimale de 400 m et une largeur moyenne de 150 m, il est possible d’affirmer que l’ensemble funéraire s’est étendu sur au moins 6 ha. A ce jour, 5 ha ont pu être décapé et 1113 tombes sont fouillées. Ces chiffres impressionnants suffisent à justifier le caractère majeur du site du Causse pour la connaissance des ensembles funéraires protohistoriques du Midi de la France.
BUFFAT (L.), DURAND (B.), VANNIEUWENHUYSSE (D.), BOIS (M.), ROVIRA (N.), MASBERNAT-BUFFAT (A.) – La ferme gallo-romaine de Beaulieu. Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Loupian, juillet 2011, 272 p.
Responsable d’opération : L.Buffat
Cette opération a permis de mettre au jour une ferme gallo-romaine intégralement dégagée sur une surface de 2000 m2 ainsi qu’une zone agraire. L’établissement s’organise autour d’une grande cour centrale surcreusée. Au nord et à l’ouest se trouvent deux corps de bâtiment. Le bâtiment nord comporte six pièces aux dimensions très variables. Le bâtiment oriental se compose de deux très grandes salles dotées chacune d’un pilier porteur central. Malgré l’absence de sol et d’aménagement significatif conservé l’analyse du plan et la morphologie des pièces suggèrent d’interpréter l’aile ouest comme un espace agricole (bâtiment de stockage et/ou logement pour des animaux) et l’aile nord comme le siège de l’habitation. L’ensemble du mobilier récolté se rattache aux Ier et IIe s. apr. J.-C. La zone agraire est marquée par deux très grands fossés. A leur intersection, est apparu un dispositif inhabituel matérialisé par une douzaine de petites tranchées perpendiculaires. Quelques mètres en aval de celles-ci, des encoches sont clairement visibles sur les parois du fossé, évoquant une trace de vanne. L’ensemble évoque sans guère d’ambigüités un système d’irrigation. Le mobilier retrouvé dans le comblement des fossés permet de dater leur fonctionnement des Ier-IIe s. ap. J.-C. Les données obtenues sur ce site permettent une documentation d’importance concernant les établissements ruraux du Haut Empire des zones basses de la plaine des Sorgues du Comtat.
DUNY (A.), RIVALAN (A.), SAVE (S.), BANER JEA (R.), BOREHAM (J.) – Un habitat du Bronze Moyen en Roussillon : le site du Mas Delfau à Perpignan. Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Cournonterral, janvier 2013, 105 p.
Responsable d’opération : A.Duny
La fouille a permis de mettre au jour des vestiges d’habitat et une sépulture du Bronze moyen. En position centrale au sein de l’emprise de fouille, a été découverte une structure au contour relativement polylobé (FS1006). Trois trous de poteau, répartis dans les quarts nord-est et sud-ouest, s’intègrent dans le périmètre de la fosse. Au centre de la fosse ont été exhumés les restes d’un foyer à galets chauffés. La surface sur laquelle repose le lit de galets compte des nodules d’argile rubéfiée et des micros-charbons, également témoins d’une activité liée au feu. Concernant le mobilier, un fragment de panse de tasse carénée munie d’une anse à poucier, découvert lors du diagnostic dans le comblement inférieur de la fosse, permet une attribution chronologique. Cet élément coïncide avec les calibrations AMS réalisées sur des charbons issus du même comblement, conférant une date Bronze moyen I à la structure. Située dans le quart sud-ouest de l’emprise, la fouille de la fosse FS1005 a permis d’observer en place les restes osseux d’un individu adulte. Des calibrations AMS ont été réalisées sur les dents du sujet et donnent un résultat de : 3260 ± 30BP soit 1616-1454 Cal BC (95,4% Poz-50372). Au regard des données induites par le mobilier céramique et les datations AMS, le site du Mas Delfau à Perpignan semble s’inscrire dans la première moitié du Bronze moyen. Nous sommes ici dans le cadre d’un petit habitat de plein air dont l’occupation, bien que nous étant parvenue de manière très lacunaire, apporte un élément de comparaison supplémentaire à une documentation encore très discrète. Cette fouille apporte ainsi une contribution nouvelle à la connaissance des occupations de plein air du Bronze moyen en Roussillon.
LE ROY (L.), BROCHIER (J.-L.), DURAND (B.), MALIGNAS (A.), GUALANDI (S.), ROVIRA (N.), MASBERNAT-BUFFAT (A.), BERDAUX-LE BRAZIDEC (M.-L.) – L’évolution d’un habitat dans la vallée de la Drôme : de la villa du Haut Empire à l’établissement du Haut Moyen Âge. Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Loupian, mai 2011, 2 volumes : 199 p. et 397 p.
LE ROY (L.), BERDAUX-LE BRAZIDEC (M.-L.), MALIGNAS (A.), ROVIRA (N.) « De la villa antique à l’établissement altomédiéval de la Maladrerie à Saillans (Drôme). Permanences et mutations jusqu’au VIIIe siècle », Archéologie du Midi Médiéval, 2012. Sous presse.
Responsable d’opération : L. Le ROY
La fouille préventive menée en 2010 sur l’établissement de « La Maladrerie » à Saillans (Drôme) a permis la mise au jour d’une partie d’un vaste et riche établissement occupé de l’époque gallo-romaine au Haut Moyen Âge. Après plusieurs occupations pré et protohistoriques, la fondation du site antique se place autour du changement d’ère. Dès cette époque, l’établissement fait l’objet d’un important investissement, tant sur le plan architectural (création de plusieurs terrasses, puissants remblaiements, division en plusieurs corps de bâtiments) que résidentiel (balnéaire, marbre, tesselle, retrouvés en contexte de démolition ou remploi). Pour le Haut Empire, l’originalité du dossier viticole est à souligner. L’aile nord est, en majeure partie, occupée par un chai viticole en activité durant 2 ou 3 siècles, où se succèdent vinification en dolia, puis, probablement, vinification en tonneau ou en foudre.L’intérêt de l’opération réside aussi, et surtout, dans la très bonne conservation des occupations de la fin de l’Antiquité et du Haut Moyen Âge, échelonnées entre les IVe et VIIIe s. (Le Roy et al. sous presse). Au début du IVe s., l’aile nord est subdivisée en plusieurs pièces et une extension est bâtie sur l’espace de cour. Cette extension constitue un ensemble architectural singulier par le caractère stéréotypé et répétitif des aménagements dont disposent les 4 pièces qui le composent. Bien que les superficies soient variables, chaque pièce est munie des mêmes équipements (seuil, foyers, sols, structure sur piquets), élaborés à partir des mêmes matériaux et dont la disposition obéit à un rythme rigoureux.Une nouvelle phase de remaniements, plus profonde, intervient vers la fin du Ve s. Certaines constructions sont arasées, d’autres conservées et de nouvelles construites, marquées par l’abandon du mortier et de la tegulae. Elle aboutit à la création d’un bâtiment dont les dimensions exactes restent inconnues (extension sous les limites de fouille ?) mais qu’il est possible de subdiviser en quatre grands ensembles bâtis sur un module similaire d’environ 8 m de long pour 3 m de large. Les 2 ensembles au nord sont essentiellement occupés par des structures de chauffe. Celles associées aux phases les plus récentes présentent une relative élaboration dans leur mise en œuvre. L’interprétation fonctionnelle des ensembles au sud est plus délicate en raison d’un arasement plus prononcé (habitat ?). La fouille de l’établissement de « La Maladrerie » permet à la fois de documenter un secteur encore méconnu, celui de la vallée de la Drôme, d’aborder la vie et l’économie d’un site sur la longue durée, et d’illustrer la problématique récurrente dans le sud de la France de la transition entre un domaine gallo-romain et les occupations de l’Antiquité tardive et du Haut Moyen Âge, en particulier sur les aspects liés aux architectures (rôle des constructions anciennes dans les choix des bâtisseurs du Haut Moyen Âge) et sur l’évolution des formes de l’habitat.
MASBERNAT-BUFFAT (A.), BUFFAT (L.), HARTMANN-VIRINICH (A.), LEGRAND-GARNOTEL (A.), SCHNEIDER (L.), CHAZOTTES (M.-A.) – Le cloître de l’abbatiale. Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Cournonterral, janvier 2012, 263 p.
Responsable d’opération : A.Masbernat-Buffat
L’abbatiale de Saint-Gilles fait l’objet d’un important projet de recherche franco-allemand (Aegidiana) cofinancé par l’Agence nationale de la recherche (ANR) et la Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG), fédérant le Laboratoire d’Archéologie Médiévale Méditerranéenne LAMM UMR 6572 et l’Institut für Architekturgeschichte IFAG de l’Université de Stuttgart (voir la notice de A. Hartmann-Virnich). La partie française du programme, placée sous la direction d’Andreas Hartmann-Virnich, comprend un volet de fouille archéologique portant sur le cloître. Une première intervention archéologique, réalisée par Chr. Markiewicz en 2009, a montré l’existence d’une stratigraphie complexe et particulièrement épaisse (plus de 2 m). Grâce à une subvention exceptionnelle allouée par le Service régional de l’archéologie Languedoc-Roussillon, la première campagne de cette fouille, menée de février à mars 2010, a été complétée par une seconde, conduite d’octobre à décembre. La fouille a permis de retrouver les traces de certaines constructions du cloître roman. Les murs des galeries sud et nord ont été totalement récupérés. Leur emplacement nous est parvenu sous la forme de larges tranchées d’épierrement, attestant une récupération totale des maçonneries, à l’exception de quelques fragments laissés en place au contact d’une canalisation traversante. Quelques éléments sculptés issus du démantèlement du cloître ont été retrouvés dans les tranchées, complétant les vestiges déjà découverts par Chr. Markiewicz : portions de fûts de colonnes, restes de chapiteaux et de tailloirs, un tailloir complet utilisé comme couvrement d’une sépulture moderne à décor de feuilles d’acanthe, des blocs de pierre de taille provenant des arcades : claveau et écoinçon, et des restes d’une sépulture monumentale : restes d’une épitaphe et d’un élément figuratif (aile). Le style et la grande qualité de la sculpture, dont le morcellement intentionnel est probablement à mettre en rapport avec la transformation en chaux du décor démonté, sont comparables à celle de la façade occidentale et du chevet. Dans le préau du cloitre, ainsi que dans la galerie sud, la fouille a révélé la présence d’innombrables sépultures à inhumation dont la datation s’échelonne entre le Moyen Âge médian et l’époque moderne. En tout, 130 sépultures ou portions de sépultures ont été fouillées (étude anthropologique conduite par A. Legrand-Garnotel). Elles se répartissent sur une épaisseur moyenne de 1,2 m. Dans la partie supérieure de la stratigraphie cémétériale, les tombes sont essentiellement en pleine terre. On relève la présence d’une population diversifiée mêlant hommes et femmes, enfants et adultes. A plusieurs endroits, des tombes sont accompagnées d’une épaisse couche de chaux, placée sur et sous le corps. Dans les niveaux les plus anciens de la nécropole, apparaissent des tombes en coffres maçonnés. Ces structures funéraires, au nombre de huit, se concentrent dans les parties sud et nord du préau du cloître, à proximité des murs délimitant les galeries. La majorité de ces coffres a subi des remaniements. Les dalles de couverture ont été fréquemment enlevées pour déplacer l’individu originellement inhumé et installer un autre défunt. L’inhumation originelle apparaît donc en réduction. Seules deux tombes n’avaient pas subi de tels remaniements. A côté de ces coffres en partie maçonnés, on a également repéré trois inhumations livrant des traces explicites d’un coffrage de bois. En témoignent quelques restes ligneux (non carbonisés) retrouvés sur le squelette (couverture) et au niveau des parois. Ces tombes apparaissent dans la partie la plus basse de la séquence funéraire. D’une façon globale, l’étude du mobilier (en cours) et la réalisation de datations radiocarbones doivent permettre de caler avec plus de précision la chronologie du cimetière. En poussant les investigations sous le niveau sépulcral, nous avons pu explorer différents horizons plus anciens témoignant d’une longue occupation antérieure au monument du XIIe s. Plusieurs structures datées des Xe-XIe s. sont apparues. On signalera une tranchée marquant l’emplacement d’un mur de direction est-ouest totalement épierré ainsi que quatre silos. L’un de ces silos se démarque par ses dimensions imposantes : il est profond de 2,6 m et présente un diamètre maximum de 2 m. Le comblement des silos est riche en mobilier, notamment en céramiques et ossements animaux. La poursuite de l’exploration a permis d’identifier des structures plus anciennes. Si l’époque carolingienne n’apparaît pas clairement dans la zone explorée, nous avons par contre mis en évidence des structures antérieures. Il s’agit des traces d’un bâtiment, situé à 2,5 m sous la surface actuelle. Ce bâtiment est délimité par des murs faiblement fondés et liés à la terre. Ce bâtiment n’a pas livré de mobilier particulier. Mais des niveaux de sols gravillonneux, apparemment des sols extérieurs, qui prennent appui contre les maçonneries ont livré un mobilier qui a été daté en premier analyse des VIIe-VIIIe s. (présence de Cathma 6b et 6c, récipients en pierre ollaire). Légèrement plus bas dans la stratigraphie, on a pu identifier un empilement de niveaux assez denses jusqu’à 2,9 m de profondeur. Il s’agit de niveaux organiques, riches en charbons de bois qui évoquent la proximité de structures d’habitat. La présence d’amphore africaine, de formes tardives en sigillée claire D et de kaolinitique réductrice oriente vers une datation au VIe s. Sous ces niveaux d’occupation, une stratigraphie importante était encore conservée. Sur 1,6 à 1,9 m d’épaisseur (soit jusqu’à une profondeur de 4,8 m par rapport à la surface actuelle), une succession de niveaux très pauvres en mobilier a été explorée. S’y intercalent des niveaux de remblai (avec blocs, mortier), des couches qui s’apparentent à du substrat remanié (argile limoneuse brun ocre) et enfin des couches grises sablonneuses. Ces dernières évoquent des dépôts colluviaux (milieu humide avec faible circulation d’eau). Parallèlement, il faut noter que le substrat apparaît ici nettement plus bas qu’au sud où un précédent sondage l’avait identifié à 3,3 m de la surface actuelle. Ceci prouve l’existence d’une vaste dépression dans le secteur, qui pourrait correspondre à un talweg ou un chenal. Le remblaiement ancien de cette dépression naturelle livre probablement une information essentielle à la connaissance de la configuration du terrain. En effet, il pourrait expliquer l’affaissement des fondations de l’abbatiale romane implantées dans le secteur de l’ancienne aire claustrale ; un défaut dont l’étude archéologique du bâti a pu démontrer qu’il remonte aux débuts de la construction de l’édifice.
GALY (J.), GAILLARD (A.), FERDINAND (L.), MASBERNAT-BUFFAT (A.), PECH (J.), PIATSCHEK (C.), SEREE (F.) – Une fenêtre sur l’occupation diachronique du quartier Ancely (Toulouse, 26 Chemin de la Flambère – Tranche 5). Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Cournonterral, juillet 2012, 362 p.
Responsable d’opération : J.Galy
La fouille a permis de mettre en lumière une occupation échelonnée entre le Néolithique jusqu’à nos jours. Les vestiges d’époque néolithique sont datés du Chasséen Classique garonnais (4e millénaire avant notre ère). La découverte d’un fossé courbe a permis de compléter les connaissances sur l’organisation du village chasséen : Saint-Michel du Touch. Au-delà de ce fossé, 3 foyers à galets chauffés indiquent une activité de cuisson. 2 fosses installées dans le comblement d’un paléochenal ne contiennent pas d’indices sur leur fonction primaire (puits, puisard, silo, fosse d’extraction ?). En revanche, leurs comblements traduisent un usage de dépotoir suite à leur abandon. Le site est ensuite réoccupé à la fin du second Âge du Fer. Un ensemble de trous de poteau a permis de restituer le plan d’un bâtiment rectangulaire à abside. A une dizaine de mètres, un four circulaire à sole rayonnante lié à une activité potière a été retrouvé. Il s’inscrirait dans un grand ensemble de production potière du IIe s. av. J.-C. : l’atelier de Saint-Michel du Touch. Cette nouvelle fréquentation se traduit également indirectement par l’abondante présence de mobilier dans les structures postérieures (médiévales notamment. Pour les deux siècles suivants (Ier –IIe s. ap. J.-C.), seul un puits circulaire de 7,94 m de profondeur a été retrouvé. Un cuvelage en bois, de forme quadrangulaire était conservé au fond du puits. Les vestiges d’époque médiévale constituent un autre point important de la fouille. Deux aires d’ensilage, datées du XIIe siècle, ont été mises au jour. Les comblements de ces fosses traduisent un usage des structures comme dépotoirs après leur abandon. On relève des rejets domestiques (faune, céramique), des vidanges de foyer et des activités artisanales de forge (battitures), et de tissage (fusaïoles). Un puits dont la mise en place et l’abandon interviennent également à cette époque. Sa mise en œuvre est différente de celui du IIe s. après J.-C. Ses dimensions sont similaires, en revanche il dispose d’un cuvelage circulaire composé de briques et de tuiles en terre cuite Dans une dernière phase d’occupation du site, une maison individuelle est construite, datée de l’après seconde guerre mondiale. Cette opération a permis de documenter différentes occupations diachroniques dans un espace de 1700 m2. Elle confirme le potentiel archéologique du quartier d’Ancely et ses différentes phases d’occupation.
Localisation : Valence, Drôme
Année d'intervention : 2014-2015
Période : Antiquité/Époque médiévale
Opérateur : Mosaïques Archéologie
Responsable d’opération : L.Buffat
Cette fouille a été réalisée préalablement à l’extension de la zone d’activités de Lautagne à Valence. Le diagnostic archéologique réalisé à la fin de l’année 2010 par E. Ferber (INRAP) a mis en évidence de nombreux vestiges à l’emplacement des futurs aménagements. Ces vestiges correspondaient principalement à des camps de l’armée romaine, découverts en 1991 par A. Allimant. Le diagnostic a également mis en évidence des occupations ponctuelles d’époque néolithique et protohistorique. Ceci a motivé la prescription d’une fouille de grande ampleur par le Service Régional de l’Archéologie.
Cette fouille a été conduite par les équipes de Mosaïques Archéologie et ACTER. Elle a concerné une surface d’un peu plus de 12 ha. Elle s’est déroulée sans interruption entre décembre 2013 et mars 2015.
Les vestiges néolithiques
Le diagnostic de l’INRAP sur la tranche 1 de la ZAC de Lautagne a mis en évidence la présence d’occupations attribuées au Néolithique. Ces occurrences du début de l’Holocène ont été documentées, au cours du diagnostic, par 9 structures en creux ainsi que par du mobilier issu des tranchées. Il faut toutefois préciser que sur ces 9 structures, seules 2 sont localisées dans l’emprise de fouille qui fait l’objet du présent rapport. Le plan de répartition des tranchées ayant livré des structures datées du Néolithique laisse à voir que celles-ci sont en effet concentrées plus au nord, hors emprise.
Parmi les 9 fosses datées du Néolithique, 3 sont attribuées au Néolithique Moyen Bourguignon, 2 à du Chasséen, 1 présenterait les caractéristiques d’un faciès mixte Chasséen-NMB, 1 est attribuée à un Néolithique Moyen au sens large, 1 à un Néolithique Final « Campaniforme »-Bronze Ancien. Enfin une dernière structure renvoie à un Néolithique lato sensu.
L’examen céramique du mobilier du diagnostic mené par F. Thiercelin-Ferber et E. Néré a permis de mettre en évidence une occupation diachronique dès le Néolithique Moyen jusqu’au Néolithique final-Bronze Ancien, le Néolithique Moyen étant toutefois mieux représenté.
La présence d’un faciès de transition entre un Chasséen très récent et le Néolithique Moyen Bourguignon a été avancée sur la base de la présence d’éléments typologiques dans la céramique, associée dans au moins une des structures à des industries lithiques qui renverraient aux phases récentes du Chasséen (silex bédoulien chauffé). Les données issues des industries lithiques sont elles moins caractéristiques dans leur ensemble mais témoigneraient d’une situation contrastée. Deux types de productions sembleraient cohabiter en association avec une céramique aux influences septentrionales, l’une faisant clairement référence à un Chasséen méridional (lamelles en silex bédoulien chauffé etc.), l’autre relevant d’une production moins investie et mal caractérisée. L’hypothèse d’une présence sur le site de groupes contemporains mais n’ayant pas accès aux mêmes réseaux de diffusion a été émise.
En tout état de cause, c’est à une phase terminale d’un Chasséen aux larges influences septentrionales que semblent se rattacher les éléments attribués au Néolithique Moyen, soit 3700-3600 av. n-è.
Les objectifs de la fouille étaient donc de confirmer une occupation de la toute fin du Chasséen, dans un contexte de dilution des caractères méridionaux au profit d’influences septentrionales, de tester l’hypothèse d’une occupation synchrone du site par différents groupes n’ayant pas accès aux mêmes réseaux de distribution des matières premières. Problématiques qu’il fallait aborder d’un point de vue chronométrique (absolu et relatif) d’une part, et d’un point de vue socio-économique et culturel d’autre part.
Dans une autre perspective, l’opération devait mettre l’accent sur les aspects chronostratigraphiques et caractériser ces niveaux néolithiques par le biais d’une approche géo-archéologique en documentant les articulations entre les dynamiques sédimentaires des paléovallons et du remplissage du plateau d’une part et les structures et possibles niveaux d’occupations néolithiques d’autre part.
Pour répondre aux attentes de la prescription, à savoir investiguer les secteurs définis comme pouvant livrer des vestiges néolithiques et répondre aux questions d’ordre chrono-culturel soulevées par le diagnostic, plusieurs méthodes de fouilles ont été appliquées (décapage mécanique par tranchées parallèles, décapage mécanique sur zone ciblée, fouille manuelle de niveaux ou de structures). Ces choix méthodologiques ont été réalisés en collaboration avec le géomorphologue (J.-L. Brochier CAPRA) de manière à cibler le plus efficacement les zones où les contextes sédimentaires étaient les plus à même d’avoir conservé des niveaux et structures du Néolithique.
Les résultats de la fouille sont assez contrastés. En effet, l’opération n’a mis en évidence que 4 structures attribuées au Néolithique lato sensu, aucun autre aménagement ou sol n’ont pu être formellement identifiés et le mobilier collecté est assez pauvre (environ 1500 tessons et 256 éléments lithiques). Pourtant, sans s’inscrire en contradiction avec les résultats du diagnostic, qui mettaient en avant une occupation du Chasséen Récent, les données issues de la fouille présentent une situation légèrement différente du point de vue de la sériation chronoculturelle et mettent en évidence une étape chronologique du Chasséen assez ancienne et peu documentée dans la Vallée du Rhône en plus de l’occupation récente. Cette étape du Chasséen Ancien (terminologie céramique ; pré-traitement thermique en terminologie lithique) est documentée en particulier dans la fosse FS5012. La série céramique y présente des caractéristiques d’affinité St-Uze comme les pots sub-cylindriques, les anses en bobines mais également des éléments comme les écuelles carénées basses, les vases globuleux à col, les petites anses en ruban ou les mamelons perforés (Beeching 2002). L’assemblage lithique est composé d’éclats et de lames peu normées en silex bédoulien débités selon différentes techniques. La série peut paraître à première vue peu typique de la production lithique du Chasséen, mais s’inscrit en fait dans un petit ensemble de sites assez discrets jusqu’à présent et documentant la période 4300-4150 av. n-è (Léa 2004b, V. Léa et A. Reggio communication personnelle 2016). Ces sites se caractérisent par un débitage d’éclats ou lamino-lamellaire local, peu investi et impliquant plusieurs techniques de taille sur silex bédoulien.
Une datation radiocarbone réalisée sur graine dans la fosse FS5012 vient confirmer cette attribution : Valence L14-FS5012 Poz-78010 5410±35 B.P. soit 4345-4228 cal B.C. à 2 sigmas. Si la date est quelque peu éclatée, elle provient d’un contexte fiable et corrobore parfaitement les études de mobilier.
D’autres occurrences du Chasséen ancien sont avérées dans un fond de fosse arasé et suite au décapage mécanique : deux géométriques sur lame en silex bédoulien non chauffé, un gros éclat en silex bédoulien non chauffé repris pour un débitage de petits éclats caractéristique des phases anciennes du Chasséen (Léa 2004a, 2004b ; Léa et al. 2009) et une large anse en ruban typique. Le Chasséen récent est attesté par des vestiges épars issus d’épandages de mobilier. Aucune structure en creux identifiée à la fouille ne renvoie à cette étape. Quant au Néolithique Final, il n’est avéré que par deux fosses au mobilier ubiquiste (meule fragmentée et tessons atypiques) dont les datations radiocarbones s’inscrivent dans la deuxième moitié du IIIème millénaire entre 2565 et 2205 cal B.C.
Bien que ténus, des indices indéniables confirment une occupation dès le Chasséen ancien sur le plateau de Lautagne. La possibilité d’identifier une phase ancienne du Chasséen notamment au travers d’un ensemble clos ayant livré du mobilier homogène et une datation fiable est un jalon intéressant dans la reconnaissance des occupations du Néolithique Moyen du Nord de la Drôme, dans une situation d’interface entre influences méridionales et septentrionales.
Les camps de l’armée romaine
Les différentes opérations de fouilles et de diagnostic réalisées sur le plateau de Lautagne ont permis de repérer cinq camps militaires romains, répartis sur une surface de 50 ha (Conjard Réthoré, Ferber 2013). La fouille que nous avons réalisée a permis d’explorer partiellement trois de ces camps.
Le camp le plus ancien (Camp E)
Grâce aux différentes opérations de diagnostic et de fouille, l’extension du camp le plus ancien (baptisé camp E dans Conjard Réthoré, Ferber 2013) est bien connue. Couvrant une surface de 30 ha au minimum, il est délimité sur trois de ses côtés par un fossé qui enserre un espace de forme carrée. Sur le quatrième côté, le camp est barré par la falaise (limite nord du plateau de Lautagne). Lors de l’opération de fouilles conduite par notre équipe, ce camp a été fouillé sur une surface de 5000 m².
Le fossé défensif a été parfaitement repéré. Il correspond à un creusement à profil en V. Large de 5 m, il est profond en moyenne de 1,7 m. L’analyse du comblement a montré que cet aménagement était resté ouvert pendant un laps de temps assez long (plusieurs mois ?). En effet, à la base du remplissage, des niveaux colluviaux étaient visibles dans plusieurs sondages. Leur formation résulte apparemment de plusieurs épisodes successifs (étude en cours, J.-L. Brochier). Ces couches ont colmaté le fond du fossé sur une épaisseur variant entre 30 et 70 cm. La partie supérieure du remplissage correspond en revanche à un remblaiement volontaire, formé d’une alternance de couches de graviers et de loess. Ces couches supérieures contenaient de grandes quantités d’objets métalliques. On compte une proportion importante d’éléments d’armement. Plusieurs fragments de pilum ainsi que des pointes de flèches sont présents. Une pointe métallique à douille correspond sans doute à un trait de catapulte. Des éléments de casque ont été identifiés. D’autres pièces appartiennent à la panoplie vestimentaire du légionnaire (clous de chaussure, phalère, boucles de sangle). Près de soixante monnaies proviennent du même contexte.
Ce fossé comporte des aménagements particuliers. En effet, une dizaine de fours ont été aménagés le long de ses parois. Ils sont implantés selon un maillage irrégulier. Il s’agit de fours à profil en cloche, dont les parois sont constituées par le substrat. Les soles sont circulaires et leur diamètre varie entre 0,5 et 1 m. L’analyse de la stratigraphie montre que ces fours ont été installés alors que le fossé était partiellement comblé par des colluvions. L’aménagement de fours sur les parois d’un fossé peut paraître étonnante, voire incongrue. Elle trouve cependant quelques parallèles, en particulier en Grande Bretagne.
L’aménagement intérieur de ce camp nous échappe totalement. Il faut dire que la zone où il se trouvait a subi un arasement prononcé.
À ce stade, dater ce camp reste un exercice délicat. La céramique recueillie dans le fossé est rare. Elle se compose exclusivement d’amphore italique, avec de rares bords d’amphores Dr. 1B et Dr. 1C (étude A. Roumégous). Les monnaies sont nombreuses. Mais la nature du terrain les a fortement endommagées. Une restauration est en cours pour augmenter les chances d’identification. Pour l’heure, on se contentera de situer ce camp dans une large fourchette chronologique, contenue entre la fin du IIe s. av. J.-C. et le milieu du Ier s. av. J.-C.
Le grand camp (camp F)
Les limites de ce camp (baptisé enclos F dans Conjard Réthoré, Ferber 2013) sont connues sur trois côtés grâce aux opérations de diagnostic : au nord, où il s’étend jusqu’à la falaise ; à l’est, où le fossé d’enceinte a été suivi sur toute sa longueur (650 m) ; au sud, où le fossé a été reconnu sur une longueur de 700 m. En revanche, à l’ouest, sa limite n’a pas été vue dans les différentes opérations archéologiques menées jusqu’à présent.
Ce camp couvrait au minimum 45 ha, ce qui en fait l’un des plus grands actuellement connus en Gaule. Par comparaison, le grand camp établi par César à Gergovie avait une superficie de 36 ha. Un autre camp attribué à César, à Berry au Bac dans l’Aisne, se développait sur 42 ha.
L’opération de fouille a permis d’explorer cette installation sur une surface de 8,5 ha. De très nombreuses observations ont été effectuées sur la manière dont l’armée romaine avait édifié ce camp et sur la façon dont celui-ci fonctionnait.
Le fossé d’enceinte a été suivi sur près de 600 m de long. Il comporte un profil en V, tout à fait classique pour ce type d’ouvrage. Avec une largeur à l’ouverture de 5 m et une profondeur de 3 m, il forme une ligne défensive particulièrement imposante. L’observation des remplissages du fossé est riche d’enseignements (étude J.-L. Brochier). En premier lieu, elle montre un schéma de comblement répétitif : du côté interne du camp, sont systématiquement concentrées les couches de graviers ; du côté externe, se trouvaient des couches de loess sans aucune inclusion. Cette dichotomie dans les remplissages a été observée dans la totalité des sondages et implique donc un stockage différencié des graviers et loess lors du creusement. Nous en avons tiré la conclusion que lors de la mise en place du fossé, l’armée romaine avait procédé à un tri rigoureux des matériaux. Les graviers ont été déposés par les soldats du côté intérieur du camp pour constituer la levée défensive (agger). Le loess, quant à lui, a été stocké à l’extérieur du camp. Nous avons toutes les raisons de penser que le loess a été placé là, à l’extérieur du retranchement, pour former un obstacle défensif avancé. C’est là une particularité très intéressante, qui n’avait – à notre connaissance – jamais été observée sur les camps militaires de Gaule. Elle est par contre attestée à plusieurs reprises en Grande Bretagne, où les chercheurs l’assimilent à un dispositif de contrescarpe. Une seconde observation peut être mise en avant concernant le remplissage de ce fossé. Dans tous les sondages effectués aucun dépôt naturel, même très fin, n’a été identifié. Aucune couche d’origine colluviale ou éolienne n’est attestée dans les stratigraphies. Cette absence ne peut être imputée à des épisodes de curages : l’étude géoarchéologie permet d’en réfuter l’existence. Cette absence est donc bien réelle. Elle indique certainement que le fossé est resté ouvert pendant un laps de temps très bref.
À l’intérieur du camp, plusieurs voies ont été identifiées. La via sagularis qui longeait la levée défensive a été très clairement observée. À certains endroits, la bande de roulement, d’une dizaine de mètres de large, est conservée. Une autre voie qui traversait le camp d’est en ouest a également été mise en évidence. Bien que la bande de roulement de la voie ne soit plus présente, son emplacement apparaît avec évidence à partir du plan des vestiges.
Les structures archéologiques repérées à l’intérieur du grand camp sont nombreuses. Il s’agit principalement de vestiges de fours. Ces structures de cuisson présentent invariablement la même morphologie avec une sole circulaire de 0,5 à 1,30 m de diamètre, elle-même adossée à une fosse de travail de forme sub-rectangulaire qui couvre en général 1 à 2 m2. Dans l’un des fours, un petit moulin à grain a été retrouvé in situ dans une logette latérale. Beaucoup de ces fours ont livré des céréales calcinées (étude en cours – J. Ros). Il y a lieu de penser que ces structures servaient principalement à la cuisson des pains et des galettes. Mais cette hypothèse méritera d’être vérifiée à partir d’analyses, notamment celles qui sont conduites sur les soles (lames minces, études physico-chimiques). Ces fours sont les principaux contextes livrant du matériel archéologique à l’intérieur de ce camp. Les amphores sont de très loin les artefacts les plus représentés. Il s’agit presque exclusivement d’amphores italiques de type Dressel 1 (avec une majorité de la variante Dr1C). La vaisselle de table en céramique est presque totalement absente, que ce soit dans les fours ou dans tout autre contexte. Nombreux sont les objets en métal présents dans le remplissage des fours : monnaies, clous de chaussures, fibule, éléments d’armement.
Les emplacements des tentes ne sont pas directement identifiables. Plusieurs piquets de tente ont été retrouvés, mais aucun n’était dans sa position d’origine. Grâce à la situation des fours, on distingue plusieurs alignements qui permettront de proposer des localisations pour les contubernia (tentes des soldats).
À ce stade de l’étude, il n’est pas aisé de dater précisément ce camp. Il a livré une grande quantité de fragments de céramiques, mais avec une proportion écrasante d’amphores italiques, ce qui ne facilite pas une datation resserrée. Parmi le mobilier métallique on reconnaît plusieurs éléments peu ou pas attestés avant le second quart du Ier s. av. J.-C. Concernant les monnaies, les datations se heurtent au même problème que celui que nous avons évoqué pour le camp E, à savoir une forte altération des surfaces due à la nature du terrain (restauration en cours). À l’heure actuelle, la fourchette de datation pour ce camp est calée dans le second quart du Ier s. av. J.-C.
Le camp le plus récent (camp D)
Ce camp (baptisé camp D dans Conjard Réthoré, Ferber 2013) est parfaitement localisé grâce aux différentes opérations de diagnostic. Son fossé d’enceinte délimite un espace d’environ 25 ha, de forme carrée. En plan, ce camp se distingue des autres par la forme arrondie de ses angles.
Peu de choses sont connues sur l’aménagement intérieur de ce camp. La zone interne, étudiée sur 4000 m2 a subi un fort arasement qui a fait disparaître la plupart des aménagements. Seuls quelques tronçons de la via sagularis ont subsisté.
Le fossé du camp présente une morphologie semblable à celle des installations antérieures. Son profil est en V. Sa largeur atteint par endroit 6,5 m et sa profondeur 2 m. Vers le sud la fouille a montré une originalité. Le fossé présente en effet deux états bien distincts. Dans un premier état, le fossé était assez peu profond (1 m) et comportait un fond plat. Ce premier fossé a ensuite été comblé pour être remplacé par un fossé en V à la profondeur plus importante.
Ce camp apparaît parmi les installations militaires les plus récentes du plateau de Lautagne. Son fossé recoupe en effet celui du camp E. Il recoupe également un four attribuable au camp F. Compte tenu de ses éléments stratigraphiques, ce camp ne peut donc se placer antérieurement au second quart du Ier s. av. J.-C. La céramique, quasi-absente des contextes, n’apporte pas davantage de précisions. Le mobilier métallique est par contre plus riche d’enseignements. On y recense en particulier une pointe de flèche à barbelure unique. Il s’agit d’un type connu dès La Tène C. Mais il est principalement attesté dans les contextes césariens, à Alésia ou au Puy d’Issolud.
Les vestiges du haut Moyen-Âge
Le haut Moyen-Âge est représenté par plusieurs structures concentrées en bordure ouest du chantier. À cette période se rattachent plusieurs grandes fosses, des silos, des fours et au moins un puit.
Cinq grandes fosses sont installées dans la partie ouest de la zone de fouilles. Elles prennent la forme de creusements irréguliers mesurant de 2,5 à 6 m de longueur et atteignant pour certaines 1,70 m de profondeur. En coupe, les fosses présentent toutes le même profil, avec un fond plat et des parois quasi verticales ou piriformes. Elles comportent un petit renfoncement dans leur partie basse (creusement en sape). Cette configuration conduit à les interpréter comme de petites carrières d’extraction de lœss. Leur comblement est principalement composé de lœss remanié incluant des fragments de céramique, de la faune (probablement des rejets de boucherie), des fragments de tuiles, des galets, quelques outils métalliques et des rejets charbonneux de four ou foyer.
Trois des cinq ensembles fossoyés sont associés à des fours à cuisson rémanente sans sole suspendue, dont le fond et les parois sont constitués par l’encaissant rubéfié. Seule la sole subsiste pour deux d’entre eux ; le troisième four, installé assez profondément dans le lœss, a conservé sa chambre de chauffe sur 50 cm de hauteur. La sole, constituée de pierres et petits carreaux céramiques, mesure 1,5 m de diamètre ; au niveau de l’ouverture de la sole se trouve un aménagement de l’alandier composé de grosses pierres verticales.
Enfin, un puits d’un mètre de diamètre a été repéré au nord-ouest de la zone de fouille. Fouillé sur 1,45 m de profondeur, il présente un profil à parois droites, des parois à l’origine vraisemblablement cuvelées de bois. Toutes ces structures contenaient du mobilier du début du Moyen-Âge (VIe-VIIIe s.).
LE ROY (L.), GALY (J.), MALIGNAS (A.), MASBERNAT-BUFFAT (A.), BERDAUX-LE BRAZIDEC (M.-L.), CARRATO (C.), FERDINAND (L.), LASNIER (T.), ROVIRA (N.), SABRIE (R.) – Un établissement dans la proche campagne de Narbonne de la conquête romaine au Haut Moyen Age. Rapport Final d’Opération, Mosaïques Archéologie, Loupian, janvier 2011, 372 p.
Responsable d’opération : L. Le Roy
Cette fouille a permis d’observer l’évolution d’un établissement dans la proche campagne de Narbonne de la conquête romaine au Haut Moyen Âge
Dans une première phase datée entre la fin du IIème siècle et les débuts du Ier siècle av. J.-C., le site présente un plan éclaté, structuré à l’ouest par un puissant fossé qui a livré un important lot d’amphores italiques. Dans la partie centrale de la fouille prend place une vaste fosse de plan carré. Un empierrement et un mur sont installés à son angle nord-ouest. Le premier est percé de trous de poteaux, indices probables d’une structure légère (grenier). D’autres fosses ainsi que des trous de calage de poteaux et de piquets complètent le plan. Ils suggèrent la restitution de structures en matériaux périssables. Dans cette première phase, l’établissement montre de nombreuses analogies avec les modèles « laténiens » du nord de la France.
Dans le courant du Ier s. av. J.-C, l’établissement se dote de maçonneries liées au mortier. Il adopte un plan en U, organisé autour d’une cour centrale (ouverte au sud) bordée de trois galeries. Deux bassins occupent l’espace de la cour. Le plus grand pourrait correspondre à une citerne. Dans la dernière moitié du Ier siècle av. J.-C., le bâtiment septentrional connait une restructuration, avec l’installation d’une pièce ouverte à l’ouest. Au sein de cet espace, un bassin rectangulaire dénué de cupule est bâti. En parallèle sont creusées de vastes fosses (à dolium ?) dans la cour.
A la fin du Ier s. av. J.-C., un nouvel établissement s’installe à l’emplacement de l’aile nord du précédent. L’édifice présente une plus modeste qualité de mise en oeuvre par l’absence de liant au mortier. Une activité de production viticole est attestée. Le bâtiment est muni d’un chai situé dans l’aile orientale, composé d’au moins 16 dolia dont le comblement des fosses de récupération date son abandon de la seconde moitié du Ier s. ou au début du IIe siècle apr. J.-C. Enfin, après un hiatus, le site est réoccupé à partir du Ve s. et durant les VIe –VIIe s. et peut-être au delà.
Cette opération apporte une documentation d’un grand intérêt concernant la chronologie et l’organisation des vestiges des deux phases les plus anciennes, rarement observés en Narbonnaise, et plus particulièrement dans le courant du Ier s. av. J.-C.